Sur les traces de * Louis Félix CHABAUD *
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Jean-Marc HÉRY nous a déjà fait profiter de ses recherches sur Louis-Félix Chabaud en publiant deux billets, ici-même sur ce blog, en avril 2008 : Louis Félix Chabaud, réhabilitation d’un génie méconnu et Une villa romaine à Venelles ?
Il récidive en nous apportant cette fois, le résultat de ses recherches, découvertes, observations faites en parcourant et examinant l’ancienne propriété du sculpteur.
« Étude archéologique du site de Venelles »
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Ce document est la première partie (5 pages) de l’étude de Jean-Marc HÉRY. Une deuxième partie est en préparation avec de nombreuses photos des objets trouvés.
Si vous voulez rafraîchir vos souvenirs concernant Chabaud, deux liens :
– Louis-Félix Chabaud sur le site de la mairie de Venelles
– Louis-Félix Chabaud sculpteur, quelques œuvres à l’Opéra de Paris.
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La principale difficulté face à un site aussi étendu, consiste à concevoir des hypothèses plausibles compte tenu des observations réalisées sur le terrain et des témoignages des habitants, notamment en ce qui concerne l’évolution du site sur une période de plus de 100 ans. (depuis la deuxième moitié du 19ème siècle)
Ce que l’on sait de manière formelle :
- Louis Félix CHABAUD, dans la seconde partie du 19ème siècle (certainement lors de son mandat de maire de Venelles 1865-1870), fait réaliser un certain nombre d’aménagements sur son terrain :
- il crée un parc, il implante une pinède en « jeu de carte » à l’est
- il réalise des travaux d’irrigation
- il construit un bassin dont l’utilisation prête à controverse (voir ci-après)
- Louis Félix CHABAUD, passionné par la culture romaine, dispose chez lui de nombreux moulages qui paraissent avoir été réalisés sur des poteries, voire sur des moules employés pour la technique de la barbotine.
- Dans les années 1970, on a fait construire un bâtiment à l’Ouest du terrain, non loin du regard du canal de Traconnade.
- Il est possible de retrouver des tégulas à même le sol et en quantité importante en plusieurs endroits situés à l’est du terrain de CHABAUD ainsi que des poteries enterrées à faible profondeur, le tout dans une zone de fouille qui s’est volontairement limités à 2m*1m, de façon à ne pas endommager de façon irréversible le site.
Ce que l’on suppose d’après les témoignages :
- dans les années 1970 auraient été découverts des verreries romaines ainsi que des fragments de mosaïques
- les héritiers de CHABAUD mentionnent l’existence au nord-est du terrain, au milieu d’un champ, d’une structure circulaire ressemblant à un four de potier, située approximativement sous 1m de terre.
- Dans le champ situé en regard de la zone de fouilles auraient été découvert des murs en pierre ; ceux-ci auraient été détruits de façon à permettre le labourage dans les années 30. Ils expliqueraient l’ « anomalie » géologique constatée dans la partie sud du terrain, à savoir la présence de nombreuses pierres, de taille importante, qui auraient été entreposées là, puis exploitées par les Venellois pour construire les maisons de l’époque.
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Un étrange bassin de rétention d’eau :
CHABAUD fit construire, probablement dans les années 1860, un étrange bassin, structure rectangulaire partiellement enfouie 2 mètres sous terre, d’environ 15 m de long sur 6 de large, dominée par une voute de pierres percée d’un orifice circulaire d’un mètre de diamètre, et présentant une entrée latérale avec un petit escalier donnant accès au fond du bassin.
Cet édifice pose de très nombreuses questions… outre le fait qu’il soit implanté dans une zone où, manifestement, pourraient subsister des vestiges gallo-romains, son utilité même demeure un sujet de controverse.
– de l’implantation du bassin sur le terrain :
Le bassin est situé dans l’axe de la maison de CHABAUD, sur un terrain dont la pente naturelle est orientée vers le sud-ouest. Si l’on peut déjà s’étonner de ce que CHABAUD ne cultivait pas ses terres, on peut aussi s’étonner de l’implantation même de ce bassin qui ne permettait d’irriguer qu’une partie infime du terrain (et ne permettait pas en particulier d’irriguer la partie aménagée en jeu de carte par le sculpteur).
Situé 180m plus au Nord, ce bassin aurait réellement permis l’irrigation de la totalité du terrain, mais pas dans sa position actuelle.
– de la structure même du bassin :
Au-delà de la position du bassin, on peut s’étonner de sa structure même. Compte tenu de son implantation, il ne permettait pas de récupérer des eaux de ruissellement mais uniquement des eaux de pluie par le biais de l’orifice circulaire construit à même la voute.
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Hypothèse
On peut évidemment s’interroger sur la réelle utilité de ce bassin de rétention qui, manifestement, était soit le fruit de l’imagination d’un très mauvais architecte (ce que n’était pas CHABAUD même si son intérêt pour la matière agricole était assez restreint), soit correspondait à une autre utilité ou avait été construit là par pure opportunité.
C’est l’hypothèse que l’on serait tenté de formuler.
En effet, la localisation de ce bassin laisse à penser qu’il est très probable qu’en creusant à cet endroit, Louis Félix CHABAUD, rappelons-le grand amateur d’art romain, aurait pu trouver des vestiges et en particulier des tessons de poteries ainsi que des moules pour les sigillés.
Cette hypothèse est d’autant plus forte que l’on retrouve, autour et sur le puits, de très nombreux fragments de tégulas.
On peut donc raisonnablement émettre l’idée que CHABAUD aurait réalisé des fouilles sur son terrain.
Quels en furent les résultats ? Nul ne le sait !
Des fouilles… aux moulages
Toutefois, on peut réaliser un rapprochement audacieux avec des moulages conservés non loin de là dans sa maison et qui semblent correspondre à des sceaux utilisés pour la technique de la barbotine. L’hypothèse des moules semble confirmée, dans le lot de plâtres retrouvés, par le présence de deux pièces convexes tandis que les autres éléments ne seraient que des surmoules.
La plupart des sujets évoqués dans ces moules (de très petite taille), n’excédant que rarement 2cm de diamètre, demeurent mythologiques (combat d’Amour et Cupidon, Hercule, Hermès, Diane, Vénus…)
Moules et surmoules, collection Chabaud
Moules et surmoules, collection Chabaud – 1 – 2 – 3 – 4 – 5 –
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Différents axes de recherche
À partir de relevés topographiques simples et de constatations sur le terrain il est possible d’établir différentes conjectures qui permettent d’identifier trois zones de recherche (cliquez pour agrandir le plan ci-dessous) :
- En partant du bassin de rétention et en remontant au le nord-est vers le positionnement présumé d’un four à poteries. On longe ainsi une zone forestière qui présente une particularité géologique : la présence de deux strates :
- une strate inférieure extrêmement argileuse
- une strate supérieure beaucoup plus riche en matières végétales, qui pourrait laisser penser à un glissement de terrain. C’est essentiellement à l’intérieur de cette dernière qu’il a été possible d’isoler de nombreux tessons de poterie et de sigillés (strate qui mesure jusqu’à 50cm).
- Cette zone pourrait, d’après les témoignages recueillis, correspondre à une zone de production de poteries. Cette théorie pourrait être confirmée par la présence d’un four au Nord du terrain. Elle est d’ores et déjà fortement soutenue par la découverte, sur un périmètre de 2m², de plus de 200 tessons de poteries.
- En partant du bassin de rétention et en remontant vers le Nord OUEST.
On devrait trouver, d’après les témoignages, des restes de fondations et peut-être des éléments à caractère décoratifs tels que des mosaïques.
Il est à noter cependant que l’exploitation agricole du champ aura relégué la plupart des vestiges à une profondeur d’au moins 50cm. - En partant du bassin et en descendant vers le SUD : on se rapproche alors de la fameuse « carrière » où furent stockées les roches et tégulas qui, précisément, dérangeaient l’exploitation agricole. Celle-ci a malheureusement été largement pillée pour ce qui est des pierres, lesquelles ont servi à l’édification de nombreuses maisons sur Venelles et dans les environs.
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6 réponses à “Archéologie à Venelles”
A propos de noms écorchés, ce doit être une épidémie locale. Pour l’anecdote, lorsque vous empruntez la rue d’Italie, à Aix, une énorme pancarte vous avise, depuis plusieurs mois, que le rue Cardinale étant barrée pour cause de travaux (fin des travaux 30/01/2009, mais ils durent toujours!!!)vous devez bifurquer par la rue Fernandol!!! Et oui! à Marseille ils ont Fernandel, à Aix c’est Fernandol ! Le bon monsieur Dol, Fernand de son prénom, et par ailleurs important mécène du Musée Granet, doit se retourner dans sa tombe.
Vous avez raison Monsieur Héry, il y a des endroits où la Culture est aux abonnés absents.
Cher Monsieur Desprez,
“un parc aménagé en jeu de carte” signifie que Chabaud avait implanté des pins de façon parfaitement régulière en respectant un certain ordre (id est : un pin seul, puis deux, puis 3, etc…) , cela conférait une originalité à son terrain.
Evidemment, plus de 100 ans ont passé et cette architecture n’est plus aussi visible qu’elle l’était autrefois.
Quant à Fanny, je vous remercie, je vous assure que ce travail demande du temps et de la patience : je suis actuellement d’ailleurs sur Paris où je prépare une conférence sur CHABAUD. Quant à me faire voler ce travail… il n’est pas ma propriété au sens strict du terme : il appartient au patrimoine venellois , donc aux venellois eux-mêmes et rien ne me ferait plus plaisir que de voir un jour des bonnes volontés se déclarer pour m’aider dans ce chantier.
Bien sûr je vois ceux auxquels vous pouvez faire allusion. et bien je vous rassure : seule la moitié des découvertes a été mise en ligne pour l’instant et je sais que Monsieur DAIX mettra prochainement le reste du dossier.
Si je procède ainsi, si par le passé j’avais aussi procédé ainsi , c’était dans le seul but d’éviter précisément toute récupération.
pour Chabaud, j’espère aussi qu’il sera un jour possible de lui rendre réellement hommage. J’étais hier au Musée d’Orsay qui possède une salle dévolue à l’opéra Garnier : on y trouve représentés tous les sculpteurs qui ont collaboré à cette oeuvre monumentale : Carrier Belleuse, Carpeaux… même l’aixois Truphème ! Mais rien sur Louis Félix Chabaud qui pourtant, est présent partout et était de son vivant considéré comme le plus grand ornemeniste de l’opéra par Garnier lui-même (voir son ouvrage, le Nouvel opéra)
Il y aurait tout intérêt à remettre en avant ce sculpteur de génie… et il faut savoir qu’aujourd’hui, si Venelles n’apporte aucune aide, aucun soutien à ces recherches, j’ai reçu dernièrement une écoute très favorable de la part d’un élu de Manosque qui s’est proposé d’intercéder auprès d’une personnalité parisienne du monde de l’art pour faire avancer le projet.
A l’heure actuelle, une monographie est quasiment rédigée, je dispose d’un fond de plus de 1000 photographies et un petit film que je compte présenter lors de la conférence du 27 mars est en cours de préparation.
De l’aide serait la bienvenue… mais je crains qu’elle ne vienne pas de Venelles qui se désintéresse totalement de son patrimoine et de ce grand homme. Ce n’est pas faute d’avoir alerté la mairie, mais il semble que l’on soit vite persona non gratta sur cette commune… c’est dommage mais il en va ainsi !
C’est aussi pour cela que j’ai piqué “un coup de gueule” sur cet office du tourisme qui pour moi montre une fois encore que l’on prend le problème à l’envers : si l’on construit un office de tourisme c’est pour promouvoir , en partie, le patrimoine de la commune, pour la faire rayonner aussi. Mais cela suppose déjà s’être interrogé sur ledit patrimoine, cela suppose aussi être à l’écoute de ceux qui oeuvrent discrètement pour le valoriser ou simplement le dévoiler.
Qui sait aujourd’hui tout ce que CHABAUD a réalisé ?
Qui sait quels sont exactement les vestiges gallo-romains présents sur le territoire de la commune ?
Qui sait aussi qu’il existe à Venelles, un site très important datant du Crétacé et où abondent les fossiles ?
Je doute que la Mairie ait dans l’idée de valoriser ce patrimoine.
Or construire un office de tourisme c’est construire un bâtiment qui a un coût évident, c’est entretenir ce bâtiment, ce qui représente aussi un coût.
Un bon office de tourisme devra disposer d’un budget communication important… j’ai vu sur Venelles à quel point il était difficile de communiquer sur le festival Off and Back, il suffit de se rendre sur le site internet de la Mairie où le nom même de Chabaud est écorché… pour penser aujourd’hui qu’une telle structure n’a pas lieu d’être et n’aura jamais des moyens dignes de ce nom.
Reste que pour un office de tourisme il faut une personne à l’année : coût de l’opération approximatif rien que pour le personnel : 21000 euros !! (le smic + les charges sur un an).
Or quand on veut faire d ela culture sur cette commune on vout dit qu’il n’y a pas d’argent et on s’arrange encore pour saboter le projet (j’ai souvenir qu’en 2008 sur le festival Off and Back, la police municipale elle même était intervenue devant le public pour le renvoyer …. je ne sais pas si vous imaginez la contre-publicité !)
alors un office de tourisme… oui si c’est effectivement pour promouvoir le tourisme, faire connaître la commune au delà de ses frontières… si par contre il s’agit simplement de promouvoir tel ou tel commerce… je suis désolé mais ce n’est pas son rôle ! que la municipalité verse alors une subvention à l’AAEV et qu’elle se charge elle-même de faire sa publicité.
Bravo Jean-Marc !
Et surtout, faites bien attention de ne pas vous faire voler tous vos travaux…
(J’ai supprimé une partie du commentaire. Vous avez raison, Fanny, de féliciter JMH, restons-en là. Amicalement.DD)
qu’est-ce que vous appelez ” parc aménagé en jeu de cartes “?
Ah non !!! certainement pas !
Précision utile : les recherches sur Chabaud, les recherches sur la villa romaine (qui se poursuivent depuis 3 ans dans la plus parfaite indifférence) ne sont pas destinées à alimenter un quelconque office de tourisme.
Comme beaucoup de Venellois j’étais navré, lors des journées du patrimoine, de constater qu’il n’y avait pas une ligne sur Venelles dans la revue publiée à cet effet par la CPA… ce n’est pourtant pas faute d’avoir transmis des dossiers, des rapports… en pure perte !
Je vais devoir aussi rappeler qu’il y a deux ans, j’avais personnellement offert à la mairie de Venelles des documents d’archive (pour une valeur de 3000 euros) concernant Fernand Charpin… je me demande aujourd’hui ce qu’ils sont devenus et constate avec peine qu’il n’ont jamais été mis à la disposition des Venellois… jamais été exposés !
Certes, de nombreux dossiers ont été égarés pas la mairie de Venelles (jusqu’à celui du festival Off and Back 2009… dixit Jean-Pierre Merlin)… mais l’objectif est clair aujourd’hui et je ne remercierai jamais assez Daniel DAIX pour sa gentillesse et sa disponibilité à cet égard : mettre à la disposition du plus grand nombre des recherches qui ne se veulent pas exhaustives, qui ne sont le fruit que d’un travail amateur mais passionné : montrer aux venellois qu’il y a du patrimoine sur leur commune.
D’ailleurs , il est amusant qu’il ne m’ait jamais été permis de donner une conférence sur CHABAUD sur Venelles… alors que la ville d’Aix en accueillera une le mois prochain.
Ouvrir un office de tourisme… pourquoi pas ? il y aurait éventuellement matière… à condition de commencer à s’intéresser réellement au patrimoine de la commune : c’est un moyen et non un but.
POur ma part je continuerai de travailler sur l’histoire de ce village… sans prétendre être détenteur d’une vérité absolue d’ailleurs : je ne suis ni historien, ni archéologue… je me contente de chercher, de travailler.
Pour ce qui est du site archéologique de Venelles, la DRAC a été saisie du dossier… pour ce qui est de Chabaud, un conservateur de la BNF continue de nous apporter son aide, mais c’est un travail long, délicat.
Je promets en tout cas de continuer à tenir les venellois informés aussi longtemps qu’il me sera permis.
Je promets d’ailleurs d’autres articles, sur la question (et sur d’autres sujets)… tout en me désolant du peu d’intérêt de nos élus.
Du grain à moudre pour le futur OFFICE DU TOURISME !!!